Dans le lagon sud-ouest de Nouvelle-Calédonie, les inventaires de l’ichtyofaune des mangroves (262 espèces recensées grâce à des filets maillants, des tramails, des capéchades et des empoisonnements à la roténone) et des récifs coralliens (735 espèces identifiées au cours de comptages en plongée et d’empoisonnements à la roténone) sont comparés. Bien que près de la moitié des familles soit commune aux deux milieux, à peine 13% de la richesse spécifique totale fréquentent à la fois les mangroves et les récifs. La faible intensité de ces relations ichtyologiques est confirmée par l’étude des communautés de poissons de la baie de Saint-Vincent. Chaque mois, l’ichtyofaune de deux mangroves et de trois récifs a été échantillonnée simultanément. Globalement, les peuplements récifaux et des mangroves constituent des ensembles faunistiques diversifiés et présentent une similarité intra-échantillon élevée. En revanche, la similarité entre mangroves et récifs coralliens est très faible. La composition spécifique des communautés de poissons est étroitement liée à la nature de l’habitat et ne dépend pas de la proximité des autres milieux. Par ailleurs, aucune variation saisonnière des liens entre les communautés n’apparaît au cours du cycle annuel de l’étude. Dans la baie de Saint-Vincent, 43 espèces de poissons sont communes aux mangroves et aux récifs coralliens. Cela représente au plus 30% de la richesse spécifique et 12% de la densité sur une station. Certaines d’entre-elles utilisent la mangrove comme nurserie au stade juvénile (Lutjanidae, Carangidae, Acanthuridae,…) mais, pour la plupart, ce rôle des mangroves ne semble pas indispensable. D’autres sont ubiquistes et fréquentent les deux milieux aux différents stades de leur développement (Neoniphon samara, Sargocentron rubrum et Scarus ghobban). Le reste des espèces récifales présentes dans les mangroves y effectue des migrations essentiellement de nature trophique, aucune reproduction de poisson corallien n’étant observée. Bien que le bilan énergétique (non quantifié) soit sans doute favorable aux formations récifales, le rôle des mangroves pour la faune ichtyologique récifale est limité. En Nouvelle-Calédonie, les communautés de poissons côtiers constituent des entités relativement indépendantes.