De 1989 à 1999, les peuplements de poissons des herbiers à Posidonia oceanica de la réserve naturelle de Scandola ont été échantillonnés à l’aide d’une méthode visuelle non destructive. Les dénombrements ont été réalisés sur treize stations réparties en trois secteurs: zone hors réserve (aucune protection), réserve non intégrale (pêche professionnelle sur dérogation) et réserve intégrale (protection totale). La richesse spécifique par transect et la densité moyenne montrent des fluctuations entre années, mais au cours des dix années de suivi, elles montrent une plus faible variabilité inter-annuelle en zone protégée. Le degré de variabilité est plus faible pour le peuplement total que pour les principales familles (Labridae, Sparidae et Serranidae). Les espèces à longue durée de vie comme Serranus scriba montrent une plus faible variabilité, c’est-à-dire une plus grande inertie, que les espèces à courte durée de vie comme Symphodus ocellatus. La résilience du peuplement échantillonné (effet tampon) n’est pas affectée par l’hétérogénéité spatiale, mais est dépendante du niveau de protection. La plus grande densité de prédateurs (Serranidae) dans les herbiers de la zone protégée et dans les zones rocheuses proches exerce probablement une plus grande pression sur les peuplements de poissons inféodés aux herbiers. Cette plus grande pression de prédation, associée à l’absence totale de pêche, peut expliquer la mise en place d’un effet tampon. Bien que de telles études à long terme soient rares, les données disponibles laissent penser qu’en zone protégée, les peuplements de poissons des herbiers de phanérogames montrent un niveau de résilience assez élevé vis-à-vis des perturbations environnementales. Par ailleurs, ce travail souligne la nécessité d’entreprendre des suivis à long terme avant de pouvoir dégager des conclusions pertinentes dans l’étude des peuplements de poissons en zone littorale.