Prise en compte de la biodiversité intraspécifique pour la gestion des populations autochtones de truite (Salmo trutta L.) dans le bassin des Dranses (Haute-Savoie)

Caudron A., Champigneulle A.

Date de parution: juin 2007
Volume: 31
Number: 2
Pagination: 251-260
Editeur: Société Française d'Ichtyologie
doi: https://doi.org/10.26028/cybium/2007-312-020
Résumé

Une approche concertée entre scientifiques et gestionnaires des populations de truites communes (Salmo trutta L.) a été menée dans le bassin des Dranses en Haute-Savoie suite à des études génétiques ayant montré le maintien de populations issues du rameau évolutif méditerranéen (MED) autochtone. Sur cette zone, des déversements d’alevins de souche domestique appartenant au rameau évolutif atlantique (ATL) ont été pratiqués durant des décennies. L’étude a donc visé à évaluer et à faire évoluer les pratiques de gestion vers une meilleure prise en compte de la composante MED autochtone des populations de ce système. L’utilisation des techniques de fluoromarquage des otolithes a permis de suivre, aux stades juvéniles (0+ et 1+), la contribution de deux modes de repeuplement, à savoir les repeuplements traditionnels ATL pratiqués à de fortes densités (1,5 ind./m2) et les repeuplements de réhabilitation pratiqués à des faibles densités (0,3 ind./m2) avec des alevins MED nourris. Les résultats indiquent qu’à densité identique, les déversements ATL réalisés avec des alevins nourris ont des contributions (43% au stade 0+ et 20% au stade 1+) plus élevées que celles qui sont obtenues avec des alevins vésiculés (7% au stade 0+ et 0% au stade 1+). Avec une densité cinq fois moindre, les repeuplements de réhabilitation MED montrent une contribution qui est non négligeable au stade juvénile et qui varie peu entre le stade 0+ (21%) et le stade 1+ (30%). Quelle que soit la pratique de repeuplement, la grande majorité (70 à 100%) des juvéniles 1+ est fournie par le recrutement naturel. Suite aux résultats de plusieurs analyses génétiques et aux suivis de repeuplements, la pratique de repeuplements intensifs en alevins ATL nourris a été abandonnée sur l’ensemble du système des Dranses. Sur une partie du système (Dranse d’Abondance amont) une zone sanctuaire sans repeuplement a été créée et sur le reste un repeuplement temporaire de réhabilitation pratiqué avec des densités faibles en alevins nourris MED a été mis en place. La contribution de ce mode de repeuplement a été évaluée durant quatre années au travers des captures par pêche à la ligne dans 5 zones et pour 3 cohortes. Les classes d’âge 2+ et 3+ représentent la majorité (77-90%) des captures des pêcheurs. Pour les 3 cohortes suivies, la contribution des marqués au total des captures ne change pas du stade 2+ au stade 3+. Pour les trois classes d’âge (2+, 3+ et 4+) les taux de marqués ne varient pas significativement d’une cohorte à l’autre. Pour les trois classes d’âge 2+, 3+ et 4+ réunies et sur l’ensemble des saisons de pêche suivies, les taux de truites marquées dans les captures à la ligne varient de 10 à 30% selon les zones. L’ensemble des résultats obtenus ainsi que le rapprochement entre scientifiques et gestionnaires ont permis de faire évoluer les pratiques de gestion permettant de mieux prendre en compte les connaissances acquises sur la diversité intraspécifique de la truite.

Mots-clés: Conservation - Genetics - Intraspecific diversity - Management - Marking - Otoliths - Salmo trutta - Salmonidae
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